6. Fin du chapitre Tchèque

Je suis Sabrine, 22 ans, presque 23 et voici mon histoire

Je suis une jeune étudiante en 3ème année Communication et Etudes de la Femme (les études que pas tous les gens comprennent ni acceptent) « Communication OK mais, Féminisme ? Ah bon, ça s’apprend le féminisme ? »
Après 2 ans et demi passées à AUI (Al Akhawayn University in Ifran), j’ai voulu tenter une nouvelle expérience (comme tous les jeunes). J’ai voulu sortir un peu du cocon « Akhawaynien » pour aller à la République Tchèque et tenter de vivre un semestre entier dans un nouveau continent , dans une nouvelle ville, au sein d’une nouvelle université, avec de nouveaux gens et un mode de vie différent de celui à Ifrane. Pourquoi pas ? Après tout, ça me fera du bien de changer d’environnement quatre mois.

Mon cauchemar a commencé le jour où j’ai entamé la procédure du Visa.
Ah le Visa ! A cause des Terroristes qui s’amusent à bombarder un peu partout dans le monde comme on s’amuse à exploser un feu d’artifice, les pays développés deviennent de plus en plus strictes voire impossibles vis-à-vis des Arabes issus des pays Musulmans en ce qui concerne les Visas.
C’était la petite note politisée de ce texte.
Tout d’abord, ça a commencé par le fait que je sois Tunisienne résidente au Maroc. Le fameux Visa, je dois l’avoir au Maroc ou bien en Tunisie ? Les deux possibilités étaient envisageables mais le bémol c’est que je n’avais pas comment m’absenter pour partir dans une autre ville là où je n’ai même pas où passer la nuit pour aller à l’Ambassade de la République Tchèque et leur donner mon passeport (ce traumatise est le résultat d’une situation chaotique dans laquelle je me suis retrouvée l’été dernier : sans visa, ni passeport dans un pays qui n’était même pas le mien). Je ne voulais pas opter pour cette alternative de peur de ne pas avoir mes papiers à temps et d’être coincée encore une fois au Maroc sans document de voyage. Plan A, annulé.
Ensuite, j’ai appris que, vu que je suis tunisienne, j’aurai (toujours) le droit de demander un Visa directement à partir de mon pays « chéri » même si je n’y étudie pas. Ce fut une très bonne nouvelle et j’ai continué à préparer les papiers nécessaires pour pouvoir déposer mon dossier à temps. Ahhh, le temps … c’est ce qui a tout détruit dans cette histoire. Plus qu’un mois et quelques jours et le semestre allait commencer.
Le lendemain de mon arrivée en Tunisie, je suis partie vers le service consulaire Tchèque en Tunisie pour déposer mon dossier et enfin obtenir ce fameux petit bout de papier collé avec beaucoup de haine sur mon passeport.
«  Il te faut un certificat de travail de ta maman, son compte bancaire, ses 3 dernières fiches de paie, une assurance, le contrat de ton appartement à Prague, un essai là où tu nous citera tes motivations et qu’est ce qui t’as fait penser à la République Tchèque … et la liste est beaucoup plus longue » … *mince alors, je pensais que c’était beaucoup plus compliqué que ça ! Pourtant j’avais carrément préparé tous mes bulletins scolaires depuis ma toute première année à l’école, mes photos de vacances de 1999 à 2016, une liste des couleurs de mes culottes de 2005 à 2009 et enfin le certificat de décès de mes parents qui sont toujours en vie, zut alors, vous êtes tellement faciles les Tchèques !!!!*

J’ai tout préparé avec l’aide de mes parents et le soutien de mes amis et je suis partie fière de mon dossier bien organisé en main.
« Bon, je vais vous donner un Visa Schengen de trois mois seulement et puis une fois à Prague, débrouillez-vous ! »  (elle l’a dit sur un ton de « démerdez-vous » mais bon, elle s’est empêché de le dire pour ne pas dépasser les limites de son professionnalisme)
Après une longue discussion, elle m’a fait comprendre que le procédure d’un Visa étudiant prend beaucoup plus qu’un mois et qu’elle a fait son maximum pour me donner ce fichu Visa Touriste.
J’était contente, voire très contente ! ça y est, le rêve se réalise enfin pour moi, Prague j’arrive !
En effet, je suis partie à Prague, souriante, heureuse et très motivée pour vivre une très jolie expérience tout en gardant en tête que je dois régler mes papiers … non, que je dois « me débrouiller ».

C’est là où est apparue Mademoiselle Irena. Une jeune femme très gentille qui travaille à l’université dans le département des « Etudiants Etrangers ».
Mon problème était un casse-tête chinois pour elle : « Tunisienne, vit au Maroc, Visa, Etudiant … non Schengen, prolongation de la période, 3 mois.. non un mois seulement, tu avais assez de temps mais tu regardais les dessins animés… non tu n’avais pas assez de temps pour regarder la télé … non… pas assez de temps pour avoir le Visa Etudiant oui oui, tu es un male … non femelle, Nord … non East …non West West, excuse-moi … »
Après les multiples rencontres avec Irena, elle a finalement bien compris mon histoire et a décidé de m’aider. Elle est partie avec moi plusieurs fois dans plusieurs bureaux rien que pour trouver une solution à cette énigme. Elle a essayé par tous les moyens mais en vain… !
J’étais presque en couple avec tous les employés qui travaillent à l’Ambassade de Tunisie en République Tchèque : entre les visites et les coups de fils, on a passé assez de temps ensemble quand même, c’était très fusionnel !
J’ai enfin compris que je devais revenir en Tunisie pour avoir un autre Visa pour pouvoir finir le dernier mois du semestre en paix, passer mes examens, faire mes adieux et revenir de là où je suis venue.

Je rêvais de passer un joli Spring Break quelque part avec mes amis mais bon, ce problème de paperasse a hanté ma vie et je ne pouvais plus planifier pour les vacances. Je suis rentrée en Tunisie dans l’espoir de tout régler à temps …
Pour ceux qui l’ignorent, le service consulaire Tchèque est disponible 2 jours par semaine, seulement 2 heures par jour : Lundi et Mercredi de 9h à 11h ( sans mentionner le fait qu’il y a des gens qui passent des nuits entières devant l’Ambassade pour pouvoir être les premiers sur la liste et avoir la possibilité de rentrer à l’intérieur à temps).
Je me suis présentée non pas une fois, non pas deux fois mais trois fois. La première, ils cherchaient encore les œufs de Pâques dans leur jardins, la deuxième, il n’y avait pas assez de temps pour faire passer tout le monde et la troisième, ils avaient une « riunion » (comme le gardien n’arrêtait pas de nous le dire » Je leur suis reconnaissante quand même… en total de 5 heures d’attente, j’ai pu finir un livre de plus que 300 pages debout, sous le soleil ! merci les Tchèques !
A un certain moment, j’ai décidé de repartir tant que mon Visa est valide et dépasser la date limite de mon Visa sur le territoire Tchèque sans accorder beaucoup d’importance aux lourdes conséquences que pourraient engendrer cet acte irresponsable de ma part : c’est simple, clandestine je serais, une interdiction d’entrée à l’espace Schengen j’aurai !

Que puis-je faire à ce niveau-là ?
Laisser tomber ne me ressemble pas en général mais là, j’ai utilisé tous les tours que j’avais dans ma poche, je n’ai plus qu’une seule solution qui laissera mon historique à l’aéroport sain et mes papiers légaux :  laisser tomber le semestre ! Ce que j’ai appris, ce que j’ai créé, ce dont j’ai rêvé, ce à quoi j’ai songé .. tout ce qui a une relation avec l’université à Prague, va s’évaporer bientôt , très bientôt !
Ce semestre a été bourré de déceptions personnelles et scolaires et je suis sur le point de tout jeter et de laisser ce très mauvais chapitre derrière moi.
J’ai appris, j’ai beaucoup appris, je ne veux pas être confrontée à une situation là où je serai obligée d’assumer les conséquences du dépassement d’un Visa un jour car, je ne saurai guère gérer ça !
Je jette l’éponge …
Je reviens à Prague, je ramasse ce qui reste de mes affaires et je retourne à mon pays, chez ma famille, au milieu de mes amis et j’attends le semestre prochain pour continuer mon Bachelor en Communication et Etudes de la Femme !

S.J 









Commentaires

  1. Rien n'est perdu! tout est à ton honneur. Tu as gagné en expérience et tu dois en être fière. Cet article mérite de faire partie d'un chapitre de ton autobiographie.

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